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«L'importance des thérapies innovantes doit être considérée dans une perspective sociétale globale»

20/03/25     

Une nouvelle étude de l'institut de recherche gfs.bern montre comment la population suisse se positionne par rapport aux thérapies innovantes, les attentes qu'elle a concernant l'accès aux traitements personnalisés et les défis à relever. Urs Bieri, codirecteur de gfs.bern, et René Buholzer, directeur d'Interpharma, donnent un aperçu des résultats de l'étude et expliquent leur importance pour l'industrie pharmaceutique et le système de santé en Suisse.

Modérateur: Monsieur Bieri, pouvez-vous nous donner un bref aperçu de la nouvelle étude? Quels sont les éléments à retenir?

Urs Bieri: Avec plaisir! L'étude examine l'opinion de la population suisse à propos de la médecine personnalisée. Il est particulièrement intéressant de noter que 84% des personnes interrogées estiment que toute la population suisse devrait avoir accès aux thérapies innovantes, indépendamment des coûts. En outre, l'étude montre également que la solidarité dans le domaine de la santé joue un rôle important pour les personnes interrogées.

Modérateur: Monsieur Buholzer, pourquoi, selon vous, la solidarité joue-t-elle un rôle si fondamental lorsqu'il s'agit de l'accès à des thérapies innovantes?

René Buholzer: Dans ce contexte, la solidarité signifie que les thérapies innovantes profitent au plus grand nombre possible. C’est une évidence: les patient.e.s veulent avoir la possibilité de profiter des progrès de la médecine. Les sociétés pharmaceutiques souhaitent que tout le monde ait un accès égal à leurs innovations. Mais nous voulons par ailleurs garantir que le système de santé reste durablement finançable.

Modérateur: C'est en effet un point qui ressort de l’étude. Une majorité écrasante de la population souhaite que tout le monde ait accès à des thérapies innovantes, tout en maintenant un système de santé finançable. Quels sont les défis à relever?

Urs Bieri: Les coûts élevés des thérapies innovantes représentent le plus grand défi. Cependant, 84% des personnes interrogées considèrent que les économies à long terme sont un avantage, car les thérapies efficaces permettent un retour plus rapide à la vie quotidienne et réduisent ainsi la charge du système de santé. De plus, les patient.e.s guéri.e.s peuvent à nouveau travailler, payer des impôts et participer activement à la vie sociale. L'accès à l'innovation devrait donc être considéré non seulement d'un point de vue individuel, mais aussi d'un point de vue sociétal.

Modérateur: Monsieur Buholzer, qu'est-ce que cela signifie pour l'industrie pharmaceutique? Quelles solutions envisagez-vous?

René Buholzer: Pour l'industrie, il est central que les nouveaux traitements innovants soient accessibles à tous dès qu'ils obtiennent l'autorisation de mise sur le marché – exactement comme la population le souhaite. Malheureusement, c'est de moins en moins le cas aujourd'hui, car la procédure de fixation des prix des médicaments est encore bloquée au siècle dernier, alors que les innovations médicales ne cessent d’émerger. Il est donc crucial que nous modernisions cette procédure, en collaboration avec tous les acteurs concernés.

Modérateur: L'étude s'est également penchée sur les critères qui pourraient être utilisés pour justifier le recours à des thérapies coûteuses et innovantes. Quels critères la population considère-t-elle comme particulièrement pertinents?

Urs Bieri: L'étude montre que, du point de vue de la population, seules des raisons médicales devraient être décisives pour l'accès à un traitement. Il existe par ailleurs différents facteurs qui peuvent être pris en compte lorsqu'il s'agit de déterminer si une thérapie innovante peut être appliquée. L'état de santé des patient.e.s, leur âge et leur longévité sont particulièrement importants. Parallèlement, la plupart des personnes s'opposent à un plafonnement strict des coûts des thérapies – elles ne veulent pas d'une limite financière stricte (y compris pour les personnes âgées), mais d'un arbitrage basé sur plusieurs facteurs.

Modérateur: Toujours d’après la population, qui devrait décider de l’accès à une thérapie?

René Buholzer: Les résultats montrent que les personnes interrogées attribuent en premier lieu cette compétence décisionnelle aux médecins - en étroite concertation avec les patient.e.s. Il existe une grande confiance dans le fait que les professionnels de la santé font le meilleur choix possible pour chaque situation, en collaboration avec les personnes concernées. En politique, en revanche, on observe une tendance croissante à confier ce genre de décisions à l'État. Je trouve cela dangereux.

Modérateur: En conclusion: Quels sont, selon vous, les principaux enseignements à tirer de cette étude?

Urs Bieri: La population suisse soutient le principe de solidarité et est favorable à un large accès aux thérapies innovantes. Il existe toutefois des enjeux en matière de financement qui doivent faire l'objet de discussions plus approfondies. Parallèlement, les avantages sociaux à long terme des thérapies innovantes occupent une place centrale dans le débat.

René Buholzer: Je ne peux que me rallier à ce point de vue. L'objectif doit être de permettre à tous les patient.e.s d'accéder à des traitements innovants, sans surcharger financièrement le système de santé. Les propositions de l'industrie pharmaceutique pour moderniser le système de fixation des prix sont sur la table. Comme le montrent les résultats, la population attend, à juste titre, que l'industrie pharmaceutique, les politiques et les prestataires de soins trouvent ensemble des solutions.

L'étude complète est disponible ici (en anglais): Cockpit gfs.bern

Télécharger la fiche d'information sur l'étude: La fiche d'information